Evolution des points de vue sur l'annexion de
la Lettonie de 1940 à 1990.
Position des Etats-Unis sur l'annexion des Etats baltes du 23
juillet 1940.
(GB)
Au cours de ces derniers jours, les voies détournées par
lesquelles l'indépendance politique et l'intégrité
territoriale des trois petites républiques baltes - l'Esthonie,
la Lettonie et la Lithuanie - devaient être
délibérément annihilées par l'un de leurs
voisins les plus puissants, ont rapidement été mené
à leur conclusion.
Depuis le jour où les peuples de ces républiques ont acquis
pour la première fois leur indépendance et une forme
démocratique de gouvernement, le peuple des Etats-Unis a
observé avec un sincère et profond intérêt
les progrès remarquables qu'ils ont accomplis en matière
d'autodétermination.
La politique du présent Gouvernement est universellement connue.
Le peuple des Etats-Unis s'oppose à toutes activités de
pillage, qu'elles soient exécutées par l'usage de la force
ou sous la menace de la force. Il s'oppose également à
toute forme d'intervention de la part d'un Etat, quelque puissant qu'il
soit, dans les affaires intérieures de tout autre Etat souverain,
quelque faible qu'il puisse être.
Ces principes constituent les fondements mêmes sur lesquels reposent
les relations existantes entre les 21 républiques souveraines
du Nouveau Monde.
Les Etats-Unis continueront à adhérer à ces
principes, du fait de la conviction du peuple américain que,
à moins que la doctrine à laquelle ces principes sont
inhérents ne gouverne à nouveau les relations entre
nations, la règle de la raison, de la justice et du droit - en
d'autres termes, la base même de la civilisation moderne - ne
saurait être préservée.
Déclaration faite par M.Summer Wells, sous-secrétaire d'Etat.
Sources:
The Departement of State Bulletin, 27 juillet 1940, vol.III, No.57,
p.48, cité dans "Lettonie, en commémoration du
50ème anniversaire de la Déclaration d'Indépendance
de la République de Lettonie", American Latvian Association in The
United States, Washington D.C., 1968, p.69.
Commentaires:
Le Prof.A.Spekke cite W.Churchill écrivant à
Roosevelt le 7 mars 1942:
" Si Winant est avec vous, il va vous expliquer sans doute
le point de vue du Foreign Office sur la Russie. La gravité
croissante de la guerre m'a obligé de penser que les
principes de la Charte de l'Atlantique ne devraient pas être
interprétés de façon à refuser à la
Russie les frontières qu'elle avait au moment où l'Allemagne
l'attaqua. C'était une des conditions de la Russie pour
adhérer à la Charte et je crois savoir que des mesures
ont été appliquées pour liquider des
éléments hostiles dans les Etats baltes, quand la Russie
a occupé ces régions, aux débuts de la guerre.
C'est pour cela que j'espère que vous serez disposés
à nous donner les mains libres pour signer le Traité,
comme le désire Staline, le plus tôt possible�". Les
Américains refusent et la Grande Bretagne signe le Pacte
Anglo-Russe le 26 mai 1942, sans toucher au problème des
frontières.
Source: W.S.Churchill, Mémoires sur la
Deuxième Guerre mondiale, vol.IV, p.293, cité dans La
Lettonie et le problème baltique, p.60, Prof.A.Spekke, Paris
1952.
P.de Senarclens résume le traitement de la question balte
entre Staline et Roosevelt lors de la la Conférence de
Téhéran le 28 novembre 1943:
"Le président
Roosevelt enchaîna en rappelant qu'il existe également aux
Etats-Unis des personnes d'origine lithuanienne, lettonienne et
esthonienne. Il réalise parfaitement que ces
trois Républiques baltes ont été au cours de
l'histoire, puis, plus récemment, partie intégrante de
la Russie. Il n'a donc pas, explique-t-il sur le ton de la plaisanterie,
l'intention de déclarer la guerre à l'URSS au moment où
elle réoccupera ces pays. Toutefois la grande question dans
l'opinion publique américaine sera celle du référendum
et du droit à l'autodétermination.
L'opinion mondiale désirera quelque expression de volonté
populaire. Il est du reste convaincu que les peuples de ces régions
exprimeront leur rattachement à l'URSS.
Les républiques baltes, rétorque Staline, n'avaient aucune
autonomie sous le Tsar qui était allié de la Grande-Bretagne
et des Etats-Unis. Personne n'a jamais soulevé la question de
l'opinion publique. Le Président l'admet tout en évoquant
l'ignorance ou l'incompréhension de l'opinion publique pour
expliquer cette réalité passée. Il faut donc
l'informer et faire un certain travail de propagande, dit Staline. De
toute façon, la Constitution soviétique accordera à
ces peuples de nombreuses possibilités d'exprimer leur
volonté. Il n'est cependant pas question d'accepter le moindre
contrôle international. Roosevelt a beau expliquer qu'une promesse
quelconque relative à des élections futures lui serait
personnellement utile, Staline resta de marbre."
Source: Pierre de Senarclens, Yalta, Que sais-je
No.2201, Paris 1984, p.36-37.